La bibliothèque du Château de Peralada
Peralada n’est pas seulement un lieu de distractions bien connu avec son casino et son golf réputé, il est également un centre culturel et artistique important qui comporte un musée, une bibliothèque remarquable et un auditorium pour son festival de musique. La bibliothèque de Peralada a été créée à l’époque comtale puis continuée et amplifiée à l’époque de Miquel Mateu protecteur du patrimoine écrit comme l’ont été les Médicis en Italie, le grand collectionneur français du 15ème siècle Jean Grolier, ainsi que les bibliophiles anglosaxons comme Lord Spencer ou Sir Thomas Phillips.
Cette bibliothèque est éminemment une grande collection d’oeuvres de bibliophiles. Elle contient des exemplaires rares avec des dédicaces autographiées, des annotations marginales, des ex-libris d’anciens propriétaires, des exemplaires numérotés et des éditions limitées imprimées sur papier spécial.
Certaines oeuvres uniques ont une grande valeur intrinsèque. La lecture à travers tous les temps et tous les thèmes est possible. La sélection des livres présentés au visiteurs est difficile et même si certains ouvrages ont été exclus (Bibles, livres de musique, littérature pour enfants, littérature des classiques grecs et latins) cela ne signifie pas qu’ils soient sans importance.
La bibliothèque se situe actuellement à l’emplacement des cellules et de l’habitation principale de l’ancien couvent des Carmélites fondé au XIVème siècle, mais la communauté religieuse se voit obligée d’abandonner le couvent à partir de la loi de sécularisation. Au XIXème siècle grâce à une loi de réversion tenant compte des ancêtres de la famille comtale, le couvent redevient la propriété de la famille Rocaberti. En 1876 commencent les travaux de restauration de l’église du couvent. Antoni de Rocaberti, comte de Zavella, et Tomas de Rocaberti, comte de Peralada, résidant d’abord à Paris puis venant vivre à Peralada, créent la bibliothèque en 1888. La famille Rocaberti entretient également une école de théâtre et de musique. Cette époque heureuse se termine à la fin du siècle par la mort, sans laisser de descendants, des représentants de la famille Rocaberti. De la fin du XIXème siècle à l’année 1923, date à laquelle Miquel Mateu achète l’ensemble de la propriété, les bâtiments du couvent comme ceux du palais sont abandonnés et soumis à des déprédations.
Après avoir effectué de nombreux et importants travaux le nouveau propriétaire va augmenter sa collection de livres. Le nombre de volumes est alors de vingt mille. Mossén Joan Janoher, de 1929 à 1936, s’occupe de la classification de la bibliothèque travail qui va être interrompu par la guerre civile.
Marti Costa, homme simple, travailleur et autodidacte, consacre sa vie à un travail d’archiviste jusqu’en 1985. La bibliothèque est située au sud-ouest du couvent occupant cinq dépendances, deux sont consacrées à l’exposition des livres, deux aux archives et le reste aux appartements de D. Miquel Mateu.
Le nombre des volumes est passé de 20 000 en 1923 à 70 000 à l’époque actuelle. Des catalogues des différentes régions d’Espagne y parviennent. Le choix se fait en fonction des thèmes les plus intéressants: art, histoire et coutumes locales et pour donner une idée du mouvement des livres il suffit de savoir que mille d’entre eux sont enregistres par an.
Certains livres ont beaucoup de valeur car ils sont très anciens, c’est le cas des livres gothiques et des incunables (nom donné aux ouvrages qui datent de l’origine de l’imprimerie c’est à dire qui sont antérieurs à 1501).
Les premiers incunables ont été publiés à partir de la découverte de l’imprimerie par Guttenberg en Allemagne en 1455. La première imprimerie s’établit en Italie en 1463, en France en 1470 et en Espagne en 1473 à Valence puis à Burgos, Salamanque, Alcalà, Barcelone, Saragosse. . . La collection de ces incunables comporte 200 titres au total, éditions européennes imprimées à Bâle, Venise, Rome, Florence, Naples, Nuremberg, Augsbourg, Cologne, Paris, Lyon et Ulm. L’édition la plus ancienne correspond à un volume intitulé “Sermons de Robertus Caracciolus” imprimé à Venise par Francisco de Formis en 1472. En général les thèmes sont religieux, les principales oeuvres étant les suivantes : une Grammaire de Nebrija publiée à Rome en 1489, un “Malleus Maleficarum” d’Enric Institor, Nuremberg, 1494-97, “Las Siete Partidas”d’Alfonso el Sabio, publié à Séville en 1491, la “Practica” de Joannis Miquelis Savonarola, Venise 1497, et la réputée “Cosmographie” de Claudio Ptolémée, l’un des livres de la bibliothèque les plus riches en illustrations et en cartes (sur lesquelles n’étaient pas encore indiqué le Nouveau Continent) et qui fut imprimé en 1482. Le “Liber Chronicarum” de Hartmann Schedel, imprimé à Nuremberg en 1493, est également un ouvrage remarquable tant par ses gravures que par son format.
Dans la bibliothèque se trouvent également 1. 300 manuscrits dont 800 sont des titres (Executories ) de noblesse. L’étude de certains de ces manuscrits ( redevances, baux, contrats, réductions d’impôts ) a permis l’approfondissement des connaissances en histoire et en littérature. Le titre de noblesse était accordé par le roi à certains de ses sujets ayant réalisé des actes glorieux. Il comportait l’écu de la famille, l’arbre généalogique et la vierge ou le saint, patrons de la famille noble. Les écrits étaient faits sur parchemin, vélin ou papier, la reliure était en peau, en parchemin ou en velours. Les principales familles nobles catalanes qui y figurent sont les suivantes: Agulló de Valencia (XVIIe. s. ), Casas de Valencia ( XVIIIe. s. ), Folch del Pou Torrel de Barcelone (XVIIIe. s. ), Ferrer de Berga, Ferrer de Tarragone, Palau de Valence, ( XVIIIe. s. ). Le titre de noblesse le plus ancien remonte à 1460 et fut accordé à la famille Mayorgas par le roi Jean de Castille, le plus récent est de 1893. Certains titres du XVIe. siècle comme celui de Gonzalo Pedro d’Aguilar, accordé à Valladolid le 22 décembre 1557, contiennent une profusion d’éléments décoratifs: tableaux à caractère religieux, éléments floraux… Les codex constituent une catégorie intéressante de manuscrits (manuscrit signifiant bien sûr écrit à la main), dont la particularité est d’avoir été faits sur du parchemin. Il existe une grande différence entre ceux qui sont enrichis par de nombreuses miniatures et ceux qui sont sans illustrations. Ainsi on trouve des Missels et des Livres d’Heures destinés aux Rois et aux membres de la famille royale ainsi
qu’aux Princes de l’Eglise et aux nobles, tel est le “Livre d’Heures” de Jeanne d’Evreux, seconde femme du roi Charles IV de France, et le “Missal Rico” du Cardinal Cisneros.
La bibliothèque dispose de quatre Livres d’Heures des XIVe, XVe, et XVIe siècles écrits en lettres gothiques et comportant un grand nombre de miniatures, de lettres à enluminures, de pages bordées d’éléments géométriques, phytomorphiques, et zoomorphiques. La valeur des matériaux utilisés peut présenter de grandes différences allant de l’encre d’or et d’argent et de plusieurs couleurs à l’encre bicolore (noire et vermeil) ou à une encre d’une seule couleur. L’iconographie représentée est religieuse, elle comprend des scènes de l’antiquité et du Nouveau Testament ainsi que les signes du Zodiaque et des thèmes qui ont toujours inquiété le genre humain comme la mort et l’enfer. Le Codex le plus ancien conservé à Peralada est un exemplaire du XIVe siècle ayant pour titre “Pandectas i Decretales” .
Parmi les collections que contient la bibliothèque l’une des plus importantes est celle constituée par l’ensemble des mille publications différentes, écrites en diverses langues, du Don Quichote de Cervantès, collection réalisée par Miquel Mateu. Il existe aussi une collection originale, celle des livres interdits par la censure, exemple le libelle diffamatoire écrit contre la reine Marie-Antoinette et qui s’intitulait “Essais historiques sur la vie de Marie-Antoinette d’Autriche, reine de France”, publié à Londres en 1789. Les oeuvres censurées pouvaient être de différentes sortes : littéraires comme les écrits de La Fontaine ou la vie de Casanova, religieuses à caractère hérétique ou illustrations anatomiques considérées comme obscènes.
Vous êtes ou vous n’êtes pas un amoureux des livres anciens, il n’en demeure pas moins que ces derniers constituent le lien le plus précis que nous ayons avec les êtres qui nous ont précédé, formant les racines de notre présent. Si vous visitez la bibliothèque, (plaisir que nous vous souhaitons), dans la grande salle sombre et paisible vous pourrez admirer, exposés dans des vitrines, des exemplaires rarissimes. On peut remarquer entre autres le “Chronicarum Liber” en lettres gothiques de Schedel (Hartman) imprimé à Nuremberg en 1493 et une carte de l’Isle de France de 1668 où l’on retrouve Paris, l’île de la Cité et Notre-Dame, des villages représentés par une église et qui sont maintenant des banlieues parfois à problèmes (Charonne, Bagnolet, La Chapelle, Pré St Gervais, Passy …) et au nord-ouest de Paris une petite région marquée “La France”…
La bibliothèque du village de Peralada est donc une bibliothèque riche en ouvrages venant des quatre coins de l’Europe. L’entrée est située à droite du château et les visites ont lieu le matin de 10 à 13 heures, l’après-midi de 16h à 19heures.
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